Cancer du col de l'utérus : la leçon de communication santé du Danemark

La Ligue danoise de lutte contre le cancer a annoncé en avril que le Danemark était en voie d’éradiquer le cancer de l’utérus. Si ce succès repose sur une politique de santé publique pertinente, volontariste et organisée, il doit aussi beaucoup à une stratégie de communication particulièrement réactive et pertinente.

Dans un communiqué de presse diffusé le lundi 14 avril 2025, l'organisation affirme que « le cancer du col de l'utérus pourrait devenir la première forme de cancer à disparaître complètement au Danemark ». Cette perspective est une performance de santé publique remarquable : le cancer du col de l'utérus était, dans les années 1960, le troisième cancer le plus fréquent chez les femmes.

Les clés du succès : vaccination et dépistage

Le cancer du col de l’utérus présentait en 2024 au Danemark  une incidence¹ inférieure à 10 cas pour 100 000 femmes. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) considère qu'un taux de 4 cas pour 100 000 marque le seuil d'éradication.

Cette performance est encore plus marquante chez les jeunes Danoises où la tranche des 20/29 ans ne présente qu’une incidence de 3 pour 100 000.

Ces résultats spectaculaires s’expliquent d’abord par une couverture vaccinale exceptionnelle de 89 % chez les adolescents danois de 12 ans (pour la première des deux vaccinations contre le HPV). A titre de comparaison, la couverture vaccinale en France 2023, est de 55 % pour une dose chez les jeunes filles âgées de 15 ans et de seulement 26 % pour les garçons.

Cette prévention très efficace (la vaccination anti-HPV prévient jusqu’à 90 % des infections à l’origine des cancers de l’utérus) est doublée d’un programme de dépistage très suivi (60 % d’adhésion dans la population).

L’impact de la communication sur l’efficacité de la prévention santé

Pour arriver à ces indicateurs, le Danemark a aussi déployé une stratégie de communication exemplaire sur plusieurs points.

Les décideurs danois ont d’abord fondé leurs décisions sur des études et des indicateurs fiables et complets, sur une cohorte de plus de 300 000 adolescentes. Ce suivi a notamment permis de caractériser très tôt et très précisément la montée entre 2013 et 2017 des opinions critiques de la vaccination dans les médias et sur les réseaux sociaux et son impact sur la couverture vaccinale.

Les autorités danoises se sont ensuite très montrées réactives face à cette évolution, avec la mise en place rapide d’une campagne de communication intitulée « STOP-HPV – Bliv vaccineret » (STOP-HPV – fais-toi vacciner) , avec plusieurs choix gagnants : 

• Une communication basée à la fois sur les émotions et les faits (“heartbrain communication”) ’associant des histoires personnelles racontées par des femmes atteintes d’un cancer du col de l’utérus et des messages factuels, clairs et précis sur les infections à HPV, le lien avec le développement des cancers ou la sécurité du vaccin.
• Un ciblage spécifique de la population des “hésitants”, notamment les mères de famille ayant reporté les rendez-vous de vaccination, qui a permis de gagner en efficacité
• Un large éventail de canaux, notamment numériques : relations presse, site web dédié, page Facebook, compte Instagram et hashtags spécifiques (#stopHPV)
• Un investissement important dans les publications organiques sur les réseaux sociaux et le community management, avec une équipe de 5 personnes mobilisées pour répondre aux commentaires 12 heures par jour
• Un volet de marketing d’influence centré sur une collaboration étendue avec de nombreux micro-influenceurs (5 000 à 100 000 followers)
• Un travail de relations publics de terrain auprès des parents dans tout le pays, associant médecins et bénévoles 

Cette campagne de communication a été particulièrement efficace : après une chute à moins de 50 %, le taux de vaccination anti-HPV est remonté rapidement à son niveau initial (qui était de 94,9 % en 2012).

¹Nombre de nouveaux diagnostiqués cas par an

Dominique Maeker, fondateur